Biographie de Viktor Tsoï (KINO)

(La base de cet article est en grande partie traduite de la page russophone de Wikipédia sur Viktor Tsoy (ICI). L'article sera probablement enrichi de temps en temps.)

Viktor Robertovitch Tsoï est né le 21 juin 1962 à Léningrad, enfant unique de la famille de l'ingénieur d'origine coréenne Robert Maksimovitch Tsoï et de l'enseignante d'éducation physique Valentina Vassilievna. Les parents de Viktor ont divorcé en 1973 avant de se remarier un an plus tard.


Une légende du rock russe est née. Sauras-tu la retrouver sur cette image ?

De 1974 à 1977, il fréquente l'école secondaire d'art où il rejoint le groupe Palata n°6 ("La Salle n°6", nom tiré de la nouvelle d'Anton Tchékhov) en tant que bassiste. Maksim Pashkov, à la tête du groupe, lui a montré ses premiers accords et lui a fait écouter les Beatles et les Rolling Stones, le tirant dans le monde du rock'n'roll. Après son exclusion pour mauvais résultats de l'école d'art V. Siérov, il entre à l'école d'Etat professionnelle et technique 61 en spécialité sculpture sur bois. Dans sa jeunesse, Viktor était fan de Mikhaïl Boyarski et Vladimir Vyssotski, puis de Bruce Lee dont il s'est inspiré de l'image. Il pratiquait les arts martiaux orientaux.


Une soirée pyjama avec un bon copain et une télévision : Kino était sur le point de naître.


A la fin des années 1970 et au début des années 1980, des liens étroits se forment entre Aleksey Rybine du groupe amateur "Piligrimy" ("Les Pélerins") et Viktor Tsoï, encore dans le groupe Palata n°6. Ils se rencontraient chez Mike Naoumenko (du groupe "Zoopark") ou chez Andrey Panov dans l'appartement duquel répétait le groupe punk "Avtomatitcheskie oudovletvoriteli" ("Les Satisfacteurs automatiques"). C'est aussi là-bas qu'ont eu lieu les premiers "concerts en appartement" (квартирники) de Viktor. Il obtient une petite notoriété.



Vous ne le savez pas encore, mais ce jeune collectif de Léningrad va mettre le feu à vos soirées.

Viktor et Aleksey, en tant que membres des "Avtomatitcheskie oudoletvoriteli", se rendaient à Moscou et jouaient du punk-rock-métal aux concerts en appartement chez Artemiy Troitskiy. Pendant l'un de ces voyages, Boris Grebenshikov (du groupe "Akvarium", un des pionniers du rock russe) découvre Viktor qui jouait sur de la guitare avec ses amis dans le train électrique. Il lui propose de l'aide et du soutien, non seulement de sa part, mais aussi de celle d'Andrey Tropillo, de Serguey Kouriohine et d'autres.


Sans un Boris Grebenshikov à vos côtés, votre carrière de rock-star peut faire naufrage et disparaître à jamais dans les abysses de Youtube.

Pendant l'été 1981, Viktor Tsoï, Aleksey Rybine et Oleg Valinskiy fondent le groupe "Garine et les Hyperboloïdes" qui devient dès l'automne membre du Rock-club de Léningrad. Valinskiy doit partir pour l'armée et le groupe, prenant le nom de "Kino", se met à l'enregistrement de leur premier album. Kino, sous le direction de Boris Grebenshikov, organise un enregistrement, auquel prennent part tous les musiciens du groupe "Akvarium" ("Aquarium")  dans le studio d'Andrey Tropillo dans la Maison de la Jeune Technique. Kino donne bientôt son premier concert électrique avec boîte à rythmes au festival du Rock-club. Pendant la chanson "A une époque, tu étais un beatnik", Boris Grebenshikov, Mike et Punker surgissent de derrière les coulisses avec des guitares. L'album est finalisé vers l'été 1982, sa durée est de 45 minutes (d'où le nom de l'album), avant le retrait de la chanson "Je suis l'asphalte" que l'on retrouve en morceau bonus dans la réédition de l'album. L'enregistrement a connu une certaine diffusion dans le pays, on s'est mis à parler du groupe, des concerts en appartement ont commencé à Moscou et Léningrad.


Voilà pourquoi il faut toujours avoir un Boris Grebenshikov sous la main pour coacher sa carrière.
En automne, Kino enregistre quelques chansons dans le studio de Kouskov avec le batteur du groupe Zoopark, dont "Printemps" et "Dernier héros", inclus dans la compilation "Chansons inconnues de Viktor Tsoï" (seulement quatre éditions). Mais l'enregistrement est de mauvaise qualité et la diffusion a échoué, ce pourquoi Tsoï a gardé la bande.

Le 19 février 1983 a lieu le concert électrique en commun de Kino et Akvarium, pendant lequel les musiciens portent un maquillage sombre et des costumes avec des strass pour chanter "Le train électrique", "Trolleybus" et "Les concombres en aluminium". Kaspariane et Gustave sont invités à rejoindre le groupe. Au printemps, en raison de dissensions avec Viktor, Aleksey quitte le groupe. L'été se passe à répéter avec le nouveau guitariste, ce qui mène à l'enregistrement de l'album "46" conçu à l'origine comme une démo de l'album "le Chef du Kamtchatka". Aleksey Vichnia diffuse un enregistrement sur cassette à quelques amis. "46" reçoit une large diffusion et est perçu comme un véritable album. 



Viktor Tsoï, précurseur de la destruction de la cellule de base de toute société humaine pendant une soirée "Maquillage pour tous".

Durant l'automne 1983, Viktor est en observation à l'hôpital psychiatrique Saint-Nicolas Faiseur de miracles, où il reste un mois et demi pour éviter la conscription. Après sa sortie de la clinique, il écrit la chanson "Tranquillisant". Au printemps, il participe au deuxième festival de Rock-club, où Kino reçoit un titre de lauréat et où la chanson "Je déclare ma maison zone sans nucléaire" qui a ouvert le festival est reconnue meilleure chanson antimilitariste du festival de l'année 1984.


Ce jeune voyou salit le mobilier avec ses pieds, sèche l'armée et écrit des chansons antimilitaristes. S'il avait vécu quelques décennies plus tard, il conviendrait de le nommer terroriste de l'ultra-gauche.

Pendant l'été 1984, Andrey Tropillo commence, au studio Antrop, l'enregistrement de l'album "Chef du Kamtchatka" auquel ont participé, outre Viktor, Boris Grebenshikov et Serguey Kouriokhine.

En février 1985, Viktor et Marianna Igorevna Rodovanskaya se marient. Grebenshikov, Mike, Titov, Kaspariane, Gourianov et d'autres sont invités à la cérémonie.


1978 : Funérailles du concubinage de Viktor et Marianna Igorevna. Séparation pluvieuse (sans divorce) en 1987.

Au printemps 1985, Kino obtient encore un titre de lauréat et se mettent à écrire l'album "Nuit" dans le studio d'Andrey Tropillo. Le processus d'enregistrement s'étend en raison d'un désir de créer une nouvelle musique avec de nouvelles techniques de jeu ; Viktor finit par laisser "Nuit" sans le terminer et effectue en seulement un peu plus d'une semaine l'enregistrement de l'album "Ce n'est pas de l'amour" au studio d'Aleksey Vichna. Vers l'automne, "Ce n'est pas de l'amour" s'est heureusement diffusé dans le pays, et c'est en 1986 que "Nuit" sort enfin, contenant notamment les célèbres chansons "Maman Anarchie" et "On a vu la nuit". La popularité de Viktor Tsoï grandit parallèlement à la sortie d'un disque vinyle et Kino reçoit en février, au 4e festival du Rock-club, un diplôme pour les meilleurs textes.

Le 5 août 1985 naît Sacha (Alexandre), fils de Viktor et Marianna.


Sacha a bien grandi. Il a son propre club, joue lui aussi de la musique et pratique (selon des sources douteuses) comme tous les gens ayant le goût sûr, le bondage au crochet pendant son temps libre. Ne clique pas sur le lien si tu as moins de 18 ans ou que tu n'aimes pas trop les photos de bondage au crochet.

Pendant l'été 1986, Viktor travaille au bania de la perspective des Vétérans où il lave le bâtiment à la lance. Il ne fallait venir qu'une heure par jour, mais c'était de 22 à 23 heures, ce qui le dérangeait parce qu'il passait alors tout son temps avec le groupe. C'est aussi ce même été que les membres du groupe se rendent à Kiev pour le tournage du film "La fin des vacances" (réalisé par Serguey Lyssenko) avant de donner un peu plus tard un concert avec Akvarium et Alisa au Palais de la Culture MIIT à Moscou. C'est avec ces groupes que la "Vague rouge" atteint les Etats-Unis. A l'automne, Serguey Firsov propose à Viktor de travailler comme chauffeur (de machine à vapeur) et ils se sont mis à travailler ensemble à la chambre de chauffe "Kamtchatka", où ont grandi de nombreux musiciens rock célèbres. C'est là-bas que Rachid Nougmanov organise le tournage du court-métrage "Ïa-ha !" (Йя-Хха) ainsi que celui du film "Rock" d'Aleksey Outchitiel, dans lesquels apparaît Tsoï. En automne et en hiver se déroule à Yalta le tournage du film "Assa" de Serguey Soloviev.


Tiré du film "Assa". Les années 80, c'était quand même quelque chose.

Le printemps 1987 est riche en concerts : la première du film "Assa" au Palais de la Culture MELS et une dernière participation au festival du Rock-club où Kino reçoit le prix de la maturité artistique.

C'est au studio Yamaha MT44 que Kino commence à enregistrer l'album "Groupe sanguin". En automne 1987, Viktor prend l'avion pour Alma-Ata et se rend chez Rachid Nougmanov pour le tournage de son dernier film "l'Aiguille" en lien avec lequel Kino a terminé cet album et interrompu leurs concerts. Le film "L'Aiguille" et l'album "Groupe sanguin" sortent en 1988 et engendrent la "kinomania". Des tournées triomphales commencent en Russie, en Ukraine et en Biélorussie. Kino fait salle comble à tous ses concerts.


Viktor à qui on a demandé quelle est sa couleur préférée.

Le 16 novembre 1988, à un concert en mémoire d'Alexandre Bachlatchev, le public est assez agité : selon le plan, le concert devait s'achever sur la chanson de Bachlatchev "Le temps des clochettes", mais celle-ci s'est mise à jouer pour des raisons inexpliquées pendant la prestation de Tsoï, qui jouait à la guitare. Viktor arrête de jouer, ne comprenant pas d'où vient le son qui n'est pas de lui et ce qu'il se passe. L'Administration déclare plusieurs fois que le concert est terminé et que tout le monde doit se disperser. Tsoï n'est pas sorti, a vérifié plusieurs fois l'état des microphones éteints : "ils ne marchent pas". Il ne sort pas de scène, mais n'a pas la possibilité de chanter ni de dire quelque chose au public. Le public n'a pas quitté la salle, les gens faisaient du bruit, criaient, quelque chose, apparemment, n'allait pas. On a eu l'impression qu'une volonté oscure avait décidé de mettre fin au concert en enclenchant la chanson finale pendant la prestation de Tsoï. Après 10 minutes d'opposition, l'Administration a rallumé le micro. Viktor s'en est rendu compte et a déclaré au public que la chanson finale de Sacha Bachlatchev a été jouée en avance, mais qu'il est difficile de chanter et de jouer après ce fait. Il a ensuite quitté la salle, suivi du public.


Démotivateur : "Sois laconique !" (tiré du film l'Aiguille)

Au printemps 1988 est enregistré le brouillon, finalisé en hiver, de l'album "Cette étoile qu'on appelle Soleil", qu'il fut décidé de publier en automne. Tsoï fait la connaissance de Youri Aïzenchpisse, qui devient en 1989 producteur du groupe, organisant des tournées et de fréquents concerts pour la télévision, après quoi Kino obtient une renomée pansoviétique. Le jour du cinquantenaire de Viktor Tsoï, Alexandre Gradskiy racontera sur la chaîne Moskva-24 qu'Artémiy Troïtskiy avait inspiré une lettre au Comité de ville de Moscou qui devait monter les musiciens rock moscovites contre Viktor.

Viktor fait ses débuts à la télévision dans le programme "Regard" (Взгляд), ce qui est raconté dans le livre "Regard : les Beatles de la péréstroïka.

Au début de l'année 1989, le groupe Kino se rend pour la première fois à l'étranger en France, où il enregistre et publie l'album "Dernier héros" ["le Dernier des héros"]. Pendant l'été, Viktor et Kaspariane se rendent aux Etats-Unis. Le film "l'Aiguille" est le deuxième film soviétique le plus loué et Viktor Tsoï est désigné meilleur acteur d'URSS au festival du cinéma "Duc d'or" (Zolotoy Diuk) à Odessa.


Cadre du film "l'Aiguille", sous-titré par mes soins sur Youtube.

C'est le 24 juin 1990 que s'est déroulé le dernier concert de Kino à la Grande arène sportive Loujnikov de Moscou. C'est à ce concert, pour la première fois après les Jeux Olympiques de 1980, est allumée la flamme olympique. Après ce concert, Tsoï et Kaspiarine sont partis dans une datcha vers Iourmala où ils ont commencé à enregistrer du matériel sur guitare acoustique pour un nouvel album. Cet album, achevé par les musiciens du groupe après la mort de Tsoï, est sorti en décembre 1990 et a reçu le nom symbolique "Album noir" avec une pochette d'album correspondante.


Fumer tue. Rouler en Moskvitch tue. Vivre tue. Heureusement, en dehors du rock qui est éternel, toutes les bonnes choses ont une fin.

Viktor Tsoï est décédé le 15 août 1990 à 12 heures 28 minutes dans un accident de voiture au kilomètre 35 de l'autoroute Sloka-Talsi, près de Tukums en Lettonie, à quelques dizaines de kilomètres de Riga. Selon la version officielle, très vraisemblable, il s'est endormi au volant, après quoi sa Moskvitch-2141 bleue sombre s'est déportée sur la route en sens inverse avant de heurter à plus de 130 kilomètres/heures un autobus "Icarus" modèle 250. Sa mort a été instantanée, le conducteur de l'autobus n'a pas souffert. Viktor était sobre, n'avait pas consommé d'alcool au cours des 48 heures précédant l'accident. L'analyse de son cerveau a révélé qu'il s'était endormi, probablement en raison du surmenage. Son corps a été inhumé le 19 août au cimetière Bogoslovski à Léningrad.


Le savais-tu ? Viktor Tsoï est vivant, mais seulement dans nos coeurs.


La mort de Viktor Tsoï a été un choc pour de nombreux fans. Certains ont même mis fin à leurs jours. Des milliers de personnes ont assisté à ses funérailles.


Pour remercier Viktor d'avoir construit des ponts avec ses chansons, ses derniers véritables fans lui rendent hommage devant le mur qui lui est dédié à Moscou, près de la rue Arbatskaya.

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